1. Bonjour, S-Pi, merci de nous accorder cet entretien. Commencez par nous expliquer la signification de votre nom de scène et ensuite vous présenter à nos lecteurs qui ne vous connaissent pas encore. (nom, age, département, origine pays, et tout ce que tu veux dire d’autre…)
Mon nom de scène est S-Pi, S pour le Style, Pi pour l’infini. Parce que j’ai la faculté de rapper dans tous les genres, une sorte d’MC 4X4, à l’aise sur tous les intrus.
J’ai 25 ans. Je suis originaire du Zaïre où j’ai vécu peu de temps lors de mon enfance avant l'apparition des problèmes politiques et des événements tragiques qui
s'en suivirent. A l'âge de 3 ans j’emménage en banlieue parisienne, j’ai vécu dans le Val de Marne, le 9.4, Alfortville, cité des Alouettes. J’y vis une enfance tranquille, j’en garde d'ailleurs mes meilleurs souvenirs et en demeure très nostalgique et cette époque me manque. Mais en grandissant j’ai été confronté à la dure réalité concernant les conditions de vie en HLM, entre autre le fait de devoir vivre en surnombre dans un très petit appartement, les conditions précaires et le fait d'être élevé par une mère seule, ce qui me pousse à devenir indépendant très tôt malgré moi. Malgré de nombreux voyages et séjours à l’étranger, je suis toujours revenu dans mon « fief ». Je suis fier de ma ville et je revendique mon appartenance au 94 dans mes textes ! D’ailleurs, le premier single de mon street CD s’appelle « 94 Story ».
Aujourd’hui, avec 2 membres de mon équipe, la SD Click, je crée mon label avec dans l’idée de produire nos block tapes, nos mixtapes, nos street CD et nos album. Mais au-delà de ça, on accompagne les petits de la cité dans le rap, afin qu’ils ne quittent pas le « droit chemin » et qu’ils aient d’autres objectifs que de trainer dans la cité. On essaye de faire pour eux, ce qu’on n’a pas fait pour nous. A ce jour, on a produit 5 block tapes et mon street CD « Révélation » qui va sortir en avril de cette année.
2. Vous êtes d’origine Congolaise (Kinshasa), certains vous surnomme affectueusement « Mwana ma bé ». A quel moment de votre vie la passion pour la musique, notamment le Rap s’est elle manifestée ? (explique le mwana ma bé)
Mwana Mabé, sale gosse, est un surnom qu’on me donnait étant petit, parce que j’étais turbulent et têtu. Mwana Mabé me caractérise tellement que je me suis fait tatoué les initiales « M M » dans le cou…. Ca me représente, car même si je prépare mon avenir sérieusement, que je réfléchis beaucoup, une partie de moi est toujours un peu « sale gosse ».
J’ai toujours écouté du rap, depuis l’âge de 6 ans, et je me suis mit à écrire mes premiers textes à 12 ans et je crée avec 4 amis de mon quartier le groupe « 94 section », qui fut d'ailleurs un des premiers groupes créé dans le quartier, avec lequel je commence à faire mes premières scènes de quartier vers 13 ans et à enregistrer mes premières démos avec les moyens du bord (la fameuse technique du ghetto blaster et du casque de walkman servant de micro sur des faces B). Très vite j’y prends goût et notre groupe gagne même une certaine notoriété à travers la ville, poussant même d'autres groupes à se former autour de nous. Ma passion pour ce domaine va d'ailleurs faire que parmi les 5 je serai le seul à continuer... Et à 20 ans, je m’y suis mit sérieusement, à 100%, car c’est la voie que j’ai choisit.
3. Certaines réalités provenant de nos origines font que nos parents ne soient pas toujours d’accord avec nos orientations artistiques, telle que la votre. Vos parents vous supportent ils à poursuivre vos ambitions musicales ?
Au début c’était dur pour ma mère d’accepter ce choix, car elle pensait que je faisais ca juste pour m’amuser, pour passer le temps, elle ne me prenait pas au sérieux, mais lorsqu’elle a vu ma détermination, le temps que je passais à écrire, à poser, à rencontrer les gens… elle a adhéré… Et depuis elle m’encourage et me soutien.
4. Que pensez-vous des jeunes rappeurs d’origine Africaine qui ont du talent mais qui ne peuvent pas réellement se donner une chance dans ce milieu du fait de ces blocages venant de leurs parents ?
Je pense qu’il ne faut pas renier son talent car les parents ne croient pas en nous !!! On est maître de sa vie, il faut faire ses propres choix mêmes si ce ne sont pas les mêmes que ceux que souhaitent nos parents. Il faut foncer lorsque les opportunités se présentent, afin de leur prouver qu’ils avaient tort !!
5. Il est coutume chez nous en Afrique Centrale que les artistes passent leurs temps à citer les hommes politiques ou autres tout au long de leurs morceaux. Dans le milieu du rap en Europe, cela ne se fait pas véritablement. Pensez vous que les musiciens Africains en Afrique sont obligés d’en faire autant pour percer ?
En Afrique, pour pouvoir percer, un artiste doit connaitre énormément de gens importants et doit les citer dans ces morceaux pour bénéficier d’une meilleure promotion, d’une plus grande notoriété et d’une plus grande exportation. Par exemple Koffi Olomidé a réussit à remplir des grandes salles parisiennes, telles que le Zénith, l’Olympia et Bercy rien qu’en citant des noms de gens célèbres dans ces morceaux… Ca parle de soit même !!!!
Les musiciens sont grâcement rémunérés car les personnes citées dans chaque morceau payent des « dessous de table » très important aux artistes pour apparaitre dans les morceaux.
6. Vous aimez tant la musique Africaine, vos artistes du moment ? Que pensez-vous du phénomène « Coupé Décalé » beaucoup critiqué en Afrique Centrale…
Pour être honnête, je n’écoute plus beaucoup de musique Africaine, je n’ai pas beaucoup le temps pour me poser et apprécier les plaisirs d’Afrique !!! Mais j’aime écouter Fally Ipupa, Magic Système, Werrason…
Le « coupé Décalé »….. C’est une danse qui a volé la vedette au N’Dombolo, mais c’est une fierté, car venant d’Afrique, elle nous représente tous, et elle fait fureur en Europe... Donc ca se passe à fond !!! C’est tout à notre honneur car étant africain, certes du Congo, mais Africain, ca ne peut que me faire plaisir…
7. Vous avez fait de nombreuses scènes à Paris, dont on se souvient la première partie du rappeur Américain Method Man, plusieurs concerts dans des grandes salles parisiennes sponsorisées par Skyrock et Générations FM, etc. Comment êtes vous passé d’un artiste amateur à un artiste pro ? (Youssoupha)
En me rendant compte que ma musique intéressait les acteurs du rap français (animateurs radio, producteurs de concert, etc..), je me devais de me professionnaliser et de fournir un travail rigoureux, car la concurrence est rude !
De plus, j’ai fait mes premiers pas dans cette industrie aux côtés de Youssoupha, de qui j’ai beaucoup appris.
En fait, dans ce milieu les choses se font assez naturellement : Si tu es bon et que tu plais, tu avances... Moi j’ai eu la chance d’avancer un peu plus vite. Mes scènes avec Youssoupha m’ont donnés beaucoup de plaisir, tournées à travers toute la France, la rencontre avec le public… Le bonheur qu’on donne aux gens, ca motive et ca pousse à aller encore plus loin. Car c’est eux qui décident de qui va vendre ou pas. Et puis j’ai eu la chance de rencontrer les idoles de ma jeunesse (Method Man, Redman, Busta, Nas, etc.….) Que du bon !!!!
8. Comment vous êtes vous rencontrés ?
Youssoupha et moi on s’est rencontré en dehors du milieu de la musique, dans un contexte personnel, présentés par des amis en commun. C’est un véritable ami avant tout, avec lequel j’ai beaucoup de point commun, que ce soit musical ou non, on s’entend vraiment bien. On se connait depuis 7 ans et nous collaborons sur de nombreux projets, nous nous comprenons vite et si « la sauce » a prit tout de suite c’est parce qu’il est fan de mon travail et que je respecte beaucoup le sien.
9. Le Rap français à réputation d’être plus profond dans ses paroles que le rap de vos confrères américains. Quels sont vos thèmes préférés à évoquer ?
Personnellement, j’aime les fictions sur des adaptations cinématographiques (je suis fan de cinéma), le rap de rue…
Pour le moment mes textes sont plutôt ghettos, violents et proches de ma réalité, mais pour mon album j’envisage de parler de thèmes engagés comme le Sida, la perte de mes proches et les relations humaines.
10. « Jay-Z, best rapper alive », qu’en pensez-vous ?
Jay-z, c’est un des plus grands !!! C’est celui qui a prit la suite légitime de Biggie. Il est un génie de la rime, il a un charisme hors paire, et il a réussit, en partant de sa musique, à construire un empire dans le Hip Hop, due à ses qualités de businessman !
J’ai beaucoup de respect de pour lui, même si il n’est pas un modèle pour moi.
11. Votre album solo, à quand dans les bacs ?
L’album ????
Mon street Cd « Révélation » va sortir en avril de cette année, alors comme je suis perfectionniste et que je veux un album de qualité pour mes auditeurs, je vais prendre le temps de faire les choses bien... alors il sera dans les bacs début 2009 !!!
Pour le moment, j’ai enregistré un 13 titres, comprenant 4 titres connus (comme états des lieux et le Mc qui) et 9 inédits. J’ai prit mon temps pour l’enregistrer, car c’est une autoproduction de mon label « 1.6 Block Prod » et donc je voulais que tout soit parfait… J’espère que ce Street sera à la hauteur de l’attente de mes auditeurs et qu’il aura le succès qu’il mérite. Beaucoup de gens l’attendent, sur mon myspace : www.myspace.com/spidu94 on me laisse des messages pour savoir quand je serais dans les bacs….
Pour l’album… il faudra attendre encore un peu… J’ai appris dans ce métier qu’il faut prendre son temps et que rien ne sert de courir….
12. Dédicaces ?
Ma SD Click, mon équipe, 1.6 Block prod, mon label, à mon quartier Alouette Zoo, à Youssoupha, à toute l’équipe de Bomayé Music, à mon assistante personnelle qui fait un boulot énorme et à tous ceux qui font avancer le rap français.
Fuck les haineux, continuer à haïr, vous nous faites avancer !!!